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Les manifestations à Bangkok


Mais que ce passe-t-il à Bangkok !? Un 19ème coup d'Etat, des histoires de corruptions et un milliardaire en exil ? Difficile de comprendre la réalité de ce conflit qui dur depuis des années.

Le 20 mai, alors que la loi martiale venait d'être annoncée et que les soldats se préparaient à envahir les rues de Bangkok, nous sommes allés jeter un œil à ce qui semble être l'une des plus grandes manifestations de l'histoire du pays.




Mais d'abord : que se passe il en Thaïlande - en clair et facile. 

Les manifestations qui durent depuis 6 mois s'attaquent à l'actuel gouvernement ; mais à travers lui, c'est tout un système qu'elles cherchent à démanteler. Ce système, c'est le "système Thaksin", du nom du frère aîné de la chef du gouvernement au moment du coup d'Etat, Yingluck Shinawatra. 

Revenons un peu en arrière : Thaksin avait accédé au pouvoir d'abord en 2001 et avait été renversé en 2006 par un coup d'État de l'armée l'accusant d’avoir mis en place un système de corruption généralisée. Les élections suivantes ont projeté au pouvoir sa sœur, Yingluck Shinawatra, qui en fait est la marionnette de Taksin pour garder le pouvoir. Celui-ci a organisé pour elle un gros système de corruption (consistant par exemple à donner de l'argent directement aux populations les plus pauvres de Thaïlande pour qu'ils votent pour elle). Ce système avait été dévoilé en 2008 et Thaksin avait été jugé et exilé à Dubaï, ce qui ne l'empêche pas de contrôler le pays par le biais de sa sœur. 

C'est donc contre tout ça que se battent les 'chemises jaunes' à Bangkok, qui sont pour la plupart des populations plus éduquées et plus riches du Sud du pays. Ce qui a déclenché les émeutes il y a 6 mois c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase : le gouvernement (en gros : la sœur de Taksin téléguidée par Thaksin lui-même) a voulu faire passer une loi d'amnistie permettant de décharger Taksin des accusations qui pèsent sur lui en matière de corruption, ce qui aurait pu lui permettre de revenir en Thaïlande et de reprendre le pouvoir. C'est suite à cela que le peuple s'est soulevé et que 6 mois de manifestations ont commencé. 

C'est ainsi que nous sommes arrivés au 20 mai : comme si l'histoire se répétait, l'armée a annoncé sa prise de pouvoir dans le but de maintenir l'ordre. Les manifestants ont été appelés à rentrer chez eux, des bus étant mis à leur disposition. Les soldats on tiré en l'air pour disperser la foule et un couvre-feu a été mis en place dans tout le pays.





Le 20 mai - En direct des manifestations -


Le jour de l'annonce du coup d'état, les manifestants de Bangkok se préparaient à un éventuel départ après 6 mois de campement près du monument de la victoire, protestant contre le gouvernement en place. Des dizaines de milliers de thaï venus du sud du pays s'étaient installés sur cette énorme artère de Bangkok, emmenant avec eux quelques affaires, une tente et un peu d'argent. Bon nombre d'entre eux sont là depuis Novembre, certains ont dû partir retrouver leurs familles ou gagner un peu d'argent, tandis que d'autres ont rejoint le mouvement en cours de route, reprenant la tente d'un ancien!
Nous sommes allés voir de plus près ce mouvement pour découvrir qui sont ces gens et comment s'organise ce qui ressemble à une petite communauté.

Vu de loin, ça fait plutôt penser à un gros marché typique de Thaïlande, avec ses stands ambulants, de la nourriture et des vêtements partout. Le mouvement est devenu un vrai business pour des commerçants qui se sont mis à vendre tout et n'importe quoi en rapport avec le mouvement de protestation. Des Tee-shirts, des bandeaux, des sifflets : tout est aux couleurs du drapeau thaïlandais, et les manifestants en sont les premiers consommateurs.

Préparation de grosse quantité de riz
Une fois passé ce grand marché, il faut rentrer dans "l'enceinte du camping" pour mieux comprendre ce qui se trame. Des barrières déterminent la limite avec l'extérieur, surveillées par un petit groupe de manifestants souriants. Ceux-ci laissent entrer et sortir tout le monde, en regardant seulement quelques fois dans les sacs. Une fois à l'intérieur, l'ambiance est entre celle d'un camping et d'un festival. Sur des kilomètres s'étalent des grosses bâches en plastique sur lesquelles sont disposées les tentes, et d'énormes chapiteaux ont étés dressés pour protéger les campeurs du soleil et de la pluie. Au milieu de tout ça on aperçoit quelques stands de nourriture ou de boisson.


Une partie du campement
La vie dans le campement semble aller un peu au ralenti, sûrement à cause de la chaleur étouffante de Bangkok au mois de Mai (35 à40 degrés ) la moitié des gens font la sieste, allongés par terre sur des tapis en bambou. Chacun semble faire sa vie dans le calme, et des petits groupes discutent entre eux près des ventilateurs. Des écrans géants ont étés installés et retransmettent ce qui se passe à quelques kms, à Victory monument, où des concerts et des discours ont lieu toute la journée. Ensuite, à 18h c'est l'heure de l'appel du roi, et de la prière qui s'en suit; ainsi, les milliers de manifestants se lèvent comme un seul homme quand la musique du roi commence, restent debout jusqu'à la fin, se rassoient et se mettent à prier.


En marchant à travers l'immense campement, croisant des milliers de personnes installées sur plusieurs kms, on se demande comment une telle
communauté fonctionne. Ce que nous a dit "Cha", un manifestant au passé de voyageur un peu hippy, c'est que les manifestants qui rejoignaient le mouvement mettaient tout en commun, tout le monde donne l'argent qu'il a en arrivant, et ensuite ça se passe en partageant : certains font la cuisine, d'autres vont chercher l'eau, et chacun fait la queue pour prendre son plat de riz et de viande.
Les touristes qui passent se voient toujours proposer un repas (gratuitement bien sûr). Enfin, certains hommes se portent volontaires pour la sécurité, ils sont là en cas de problème et surveillent les entrées et sorties. Ce jour-là, après l'annonce de la loi martiale, une attitude assez paisible se faisait sentir chez certains, comme un début de victoire, ou peut-être le soulagement de pouvoir rentrer chez eux. D'après Cha, l'arrivée de l'armée était plutôt un signe de victoire pour leur mouvement.

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